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Rosemary Mills<br>Article tiré du journal La Tribune du 10 décembre 2003

Qu’on me permette avant toute chose de me présenter, car en l’an 2010, j’aurai 70 ans et il se pourrait que je sois l’un de vos patients.  Comme je risque d’être incapable de communiquer alors mes désirs, je profite de l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui de le faire, et vous dire comment j’aimerais que l’on me soigne… si je devais faire un séjour prolongé en gériatrie.

Tout d’abord, je voudrais conserver mon identité : JE SUIS MADAME MILLS, et c’est ainsi que je souhaite que l’on m’appelle. Je ne veux pas devenir « mémé » ou « Rose », ou « la dame du lit numéro neuf », mais garder le nom auquel j’ai toujours été habituée : rester Mme Rosemarry Mills.

Une des choses les plus importantes pour moi est l’indépendance.  Pourrais-je bénéficier d’une chambre individuelle? Probablement pas… mais alors infirmière, voudrez-vous bien veiller à ce que les rideaux soient tirés autour de mon lit lorsque l’on procède à ma toilette ou à mon habillement? Si l’on doit me laver, voudrez-vous bien vous assurer que l’eau est assez chaude, et non pas tiède? Je ne supporte pas de faire ma toilette à l’eau tiède, et je le supporterai encore moins lorsque je serai âgée.  Veuillez, s’il vous plaît, à bien m’essuyer, car il n’y a rien de plus désagréable que d’être à moitié sèche.

Si l’on me baigne, que l’on ménage mon intimité et ma dignité dans la mesure du possible… Soyez assez gentille pour chauffer ma serviette de toilette, je vous en serai très reconnaissante… En tant qu’infirmière j’ai toujours fait très attention à mes ongles, aussi j’espère qu’on les gardera courts et propres… D’autre part, j’aurais probablement besoin de soins de pédicure toutes les deux ou trois semaines…

Si je ne suis plus capable de m’habiller moi-même, j’espère que l’infirmière qui s’en occupera s’efforcera de soigner mon apparence.  J’aimerais qu’elle veille à harmoniser mes tricots et mes blouses à ma jupe… mes cardigans à mes robes… Qu’on ne m’attife pas de vieux bas ou collants filés, qu’on ne laisse pas mon jupon dépasser du bas de ma robe, et de grâce, qu’on ne noue pas mes bas juste au-dessus du genou! Et puis pourrais-je avoir les cheveux coiffés une fois que je serai habillée? Ah, bien sûr, j’espère que vous n’oublierez pas de me laver les dents! J’aimerais être coiffée une fois par semaine, mais qu’on ne s’avise pas de me mettre des barrettes ou des rubans de couleur dans les cheveux…

Quelquefois, j’irai au salon; si seulement nous pouvions y être au calme! Je suis sûre qu’il n’est pas nécessaire de laisser la télévision allumée toute la journée, sans même se soucier si quelqu’un la regarde. S’il y a des livres près de moi, assurez-vous, je vous prie, que j’aie bien mes lunettes, sinon je serai dans l’impossibilité de lire.

Si lors des repas, je suis incapable de couper mes aliments, j’espère que vous voudrez bien le faire pour moi.  S’il le faut, je ne vois pas d’inconvénients à manger avec une cuillère, pourvu qu’on me serve dans un plat creux, et non pas dans une assiette plate où je serais condamnée à chasser sans fin mes aliments.  Pourrais-je avoir une serviette (une en papier fera parfaitement l’affaire), pourvu qu’on ne me mette pas une bavette…

Ne manifestez pas d’agacement ou de réprobation si je recrache mon thé ou d’impatience parce que je suis lente, et n’entreprenez pas de me donner la « becquée » avant de vous être assuré que je n’ai vraiment plus la force de m’alimenter moi-même…

Si je devais devenir incontinente, pourrait-on continuer à me traiter comme un être humain?  Abstenez-vous de froncer le nez de dégoût lorsque vous découvrirez un lit mouillé en retirant les draps.  Ne me traitez jamais de « dégoûtante », ne me réprimandez pas, et ne me mettez pas dans l’embarras… si vous pensez que « je le fais exprès ».

Je souhaite que l’on me fournisse des tampons ou des culottes spéciales, et qu’on s’abstienne de me poser une sonde pour des raisons purement pratiques.  Je ne veux pas me promener avec un sac à urine, qui constituerait un objet de curiosité pour mes petits-enfants et une gêne pour moi.

J’aimerais que l’on m’amène aux toilettes régulièrement, qu’on me change, et qu’on ne me laisse pas clouée sur une chaise toute la journée sous prétexte qu’il est inutile de s’occuper d’une personne incontinente.  Ce serait gentil de votre part de manifester de l’intérêt pour ma famille, pour les photos exposées sur ma table de nuit ou pour mes petits-enfants lorsqu’ils me rendent visite, mais peu charitable de me demander pourquoi ma fille ne s’occupe pas de moi ou pourquoi mon fils et sa famille ne m’ont pas accueillie chez eux… Peut-être suis-je trop handicapée pour qu’ils puissent prendre soin de moi ou ils ne sont pas prêts à faire l’effort, mais quelle que soit la raison, je ne désire pas que l’on soulève ces questions.

Je serai heureuse de pouvoir faire, de temps à autre, une sortie, une excursion en minibus pour voir les arbres en fleurs et les agneaux au printemps, la mer en été, ou tout simplement m’installer dans le part lorsque le temps le permet.

Si je suis un peu « gâteuse » et ne comprends pas bien vos souhaits, ne criez pas je vous en prie, vous ne feriez que m’agiter et me troubler davantage.  Je risquerais même de devenir agressive… mais si vous me traitez avec douceur, tout ira pour le mieux.

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