SEMEURS DE PAIX

1er MAI 2013
Par ,

Bonjour,

Je ne connais pas vos visages, mais je sais que vous avez du cœur. Et quand il y a de l'amour, on peut aller très loin.

En ce temps de Pâques, les paroles du Ressuscité sont des paroles de paix, de réconfort, de confiance. Il nous envoie vers les autres pour les libérer et jeter à notre tour des graines de paix, de fraternité et d'amour.

Je me trouvais à Strasbourg, invité dans une grande librairie pour une intervention et la signature d'un livre que je venais d'écrire. Avant le début de la séance, la personne chargée de l'organisation de l'après-midi me proposa d'aller prendre un café sur la célèbre place de la cathédrale. Les touristes étaient nombreux et le soleil généreux. Assis à la terrasse d'un café, j'appréciais ce merveilleux moment. Soudain, un jeune homme vint vers moi, fléchit le genou pour être à ma hauteur et me dit : « Je suis le plus heureux des hommes, car cette nuit est né mon premier enfant qui s'appelle Morgan. J'aimerais beaucoup que vous veniez le bénir à la maison. » Oubliant la librairie, j'étais prêt à partir. Mais la secrétaire retint mon élan, et me fit comprendre qu'il allait être l'heure de retourner à la librairie. Alors je m'adresse au jeune papa : « J'irai bénir Morgan une fois que j'en aurai terminé à la librairie. » Mais la secrétaire revint à la charge : « Après la séance de signatures, vous aurez juste le temps de reprendre votre train pour Paris. » Mon visage s'assombrit. Mais le père de Morgan, qui avait toujours un genou en terre, sauva la situation : « Écrivez sur une feuille de papier la bénédiction pour Morgan. Cela suffira. » Sur une grande feuille blanche, j'écrivis d'un trait une longue bénédiction pour Morgan. Une bénédiction pour toute sa vie. Le jeune papa s'en alla heureux et disparut dans la foule. Je ne le reverrai sans doute plus et ne connaîtrai jamais Morgan, mais je les confie tous deux à Dieu dans ma prière.

****

Invité à Lille pour rencontrer une quarantaine de sans-papiers en grève de la faim, je me rends devant l'Église Saint-Maurice où est dressée une grande toile de tente. C'est l'hiver, il fait froid. Entrant sous la tente, je vois les sans-papiers allongés les uns à côté des autres, emmitouflés dans des couvertures, les visages amaigris. Algériens pour la plupart, ils entament leur cinquantième jour de grève de la faim. Quel spectacle de voir ces jeunes hommes prêts à aller jusqu'au bout, pour obtenir des papiers qui leur permettront de vivre normalement comme des citoyens à part entière ! Je m'agenouille devant chacun, prenant leurs mains, fixant leur regard. Certains sont tellement affaiblis qu'ils n'ont plus la force de parler. Mais leurs yeux parlent. Ils ont encore la force de sourire et de me remercier d'être auprès d'eux. Ils sont ma famille. Ce sont des frères. Un peu plus tard, se tient un rassemblement sur la place de la République pour soutenir la lutte des 
sans-papiers. Prenant la parole à mon tour, je témoignais de ma démarche : « Autrefois, j'avais appris à m'agenouiller devant Dieu. Aujourd'hui, j'apprends à m'agenouiller devant l'homme pour le servir. C'est ce que j'ai fait tout à l'heure sous la tente. En m'agenouillant devant chacun des sans-papiers, je reconnaissais leur dignité et l'importance de leur lutte. »

N'est-ce pas le sens du lavement des pieds ? Jésus se met à genoux devant chacun de ses apôtres.

Ce n'est pas un geste de soumission ou de faiblesse. C'est un geste de non-domination. C'est le refus de toute domination sur autrui. Jésus se met au service de l'homme, de tout son corps, de tout son être, de la tête aux pieds.

Au téléphone, une femme que je connais peu me supplie d'aller voir une de ses amies, Christine, qui est à l'hôpital de la Salpêtrière, à Paris. Elle a la maladie de Charcot et n'a plus que quelques jours à vivre. Difficile pour moi d'aller voir à l'hôpital quelqu'un que je ne connais pas et qui va mourir ! Mais au téléphone, la voix se fait pressante : « Allez voir cette femme avant qu'il ne soit trop tard. » Toute affaire cessante, je pars à l'hôpital et prie pour Christine dont je n'ai aucun renseignement. Est-elle mariée ? Est-elle croyante ? Attend-elle seulement ma visite ? Me voici arrivé devant sa chambre. En entrant, j'aperçois la malade dont le visage s'illumine d'un beau sourire. Elle est d'une grande maigreur. Un homme à ses côtés doit être son mari. Il tient à disparaître rapidement.

Me voilà seul devant Christine qui ne peut plus parler. Sur une ardoise, elle écrit rapidement et sans chercher ses mots. « Merci d'être venu me voir. Puis-je vous poser quelques questions ? » Elle tourne l'ardoise vers moi pour que je puisse lire. Je ne pouvais qu'accepter, en souhaitant que les questions ne soient pas trop difficiles. Mes réponses sont courtes et la font rire parfois. Ainsi, quand elle me demande : « Qu'est-ce qui se passera dans l'au-delà ? » Je lui réponds : « On verra bien quand on y sera ! » Nous dialoguons comme deux amis. Sa foi est grande. Elle prie. À un moment donné, Christine écrit : « Il y a une chose difficile: je n'arrive pas à pardonner ce qu'on m'a fait. C'est un obstacle que je ne peux franchir. » Je lui réponds : « C'est difficile de pardonner. Il y a des choses qu'on n'arrive pas à faire par soi-même. Alors tous les deux on va demander à notre Père du ciel de nous accorder cette grâce du pardon. » Je récite le « Notre Père ». Elle s'unit à mes paroles. Puis le « Je vous salue Marie ». Je la bénis, l'embrasse et la quitte.

Le soir, Christine m'envoie un SMS sur mon portable. Elle me remerciait de notre entretien si chaleureux et tenait à me dire qu'elle avait trouvé la paix. La paix du cœur.

Dans nos vies, brillent déjà les lumières de la Résurrection. Petites lumières dans la nuit qui indiquent que l'amour n'est pas disparu et que les braises ne sont pas éteintes. C'est quand il n'y a plus d'espoir que l'espérance se lève.

Le dimanche 7 avril 2013, lors de la prière du Regina Coeli, place Saint-Pierre, le pape François a dit : « Que la paix est le fruit de la victoire de l'amour de Dieu sur le mal, c'est le fruit du pardon, car la vraie paix vient de l'expérience de la miséricorde de Dieu. »

L'Église est envoyée par le Christ Ressuscité pour « semer la paix dans les cœurs ».

Que la paix soit avec vous.

Je vous bénis


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