Quand j’ai compris qu’il y avait des saisons à la vie, c’était l’automne. J’avais pourtant toujours cru que la vie était immuable avec un lot de joies inépuisables. J’y avais donc puisé étourdiment sans égards tant pour les autres que pour moi. Sans égards pour le reste du monde. Ma maxime étant « on n’a qu’une vie à vivre, autant la vivre intensément! »J’y allais à fond de train. J’étais en vie et je fonçais dans cette réalité sans retenue, sans réflexion!
Je n’avais donc pas prévu l’arrivée de cet automne malgré les nombreux signes précurseurs qui l’avaient maintes fois annoncé. Je me suis retrouvé sans paroisse, sur le parvis, hors les murs avec une santé plus fragile.
Criant à l’injustice, j’ai arraché à l’arbre de ma vie, toutes les feuilles de l’amour et de l’amitié. D’un geste de désespoir, j’ai piétiné les feuilles parlant d’espoir et d’avenir et ma colère a fait flétrir celles qui parlaient de bravoure ou de partage. Une fois mon arbre dépouillé, plus aucune couleur n’étincelait, plus aucune lumière ne scintillait. Ne restaient plus que l’ombre et la froidure.
Je sombrai alors dans l’hiver. Enroulé sur moi-même, j’accusais l’univers de ne pas avoir tenu ses promesses, de m’avoir abandonné.
Puis un matin, un soleil s’est levé dans ma vie. J’ai ouvert les yeux du cœur et de l’âme. Des branches de mon arbre, que je croyais mortes à jamais, naissaient des bourgeons qui annonçaient une vie nouvelle. Au pied de l’arbre, je retrouvai le baluchon de mon passé. Tout ce que j’avais semé, commençait à germer. J’ai pris cette précieuse semence et au fil des jours, je l’ai remise dans les terres qui me semblaient les plus propices à une récolte abondante. Je n’ai plus de paroisse… j’irai vers d’autres rives, il y a tellement de gens qui ne viennent plus vers nous.
C’est ainsi que l’été a refleuri dans toute sa splendeur.
Il serait prétentieux de dire que maintenant JE SAIS. Toutefois je suis plus conscient que la vie n’est pas un concours de vitesse et qu’il faut parfois prendre des temps pour faire le bilan et faire de nouveaux choix même si parfois ils nous font faire des détours. On peut quand même y voir une occasion d’engager sa vie sur de nouvelles voies. Il importe aussi de prendre des moments pour se reposer, pour réfléchir nos actions ou tout simplement de faire le ménage afin d’éviter de traîner des boulets du passé qui sont souvent trop lourds. On ne peut occulter notre passé mais il faut savoir en tirer ce qu’il en reste de positif et réengager notre vie vers d’autres routes.
Un jour un ami m’a offert ce sage conseil : «Fais du compost des expériences que tu as trouvées douloureuses. Vois ce qu’elles t’ont laissé de positif et mets ça dans ton jardin afin de faire fleurir les trésors qui ne demandent qu’à voir le jour et d’égayer ta vie. »
Aujourd’hui, l’automne venu, j’apprends à engranger les semences que je veux voir germer quand vont se terminer les temps d’intériorité que l’hiver m’aura laissés. Le printemps fait germer mes actions et l’été devient un temps de réjouissance juste avant la récolte.
Que 2015 soit belle et bonne. Et n’oublions pas: le bonheur est toujours possible.
Je vous bénis et je bénis votre nouvelle année.
Robert Jolicoeur, prêtre.